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Portrait de la reine Pomaré- Charles Giraud ©MTI
Musée de Tahiti et des Iles.
Le portrait conservé à Tahiti constitue une commande officielle de 1851, à la suite du souhait de la Reine d’en recevoir un à sa propre effigie.[3]
Charles Giraud (1819-1892) embarque pour Tahiti en 1843, à 23 ans. Sa mission lui est confiée par le Gouverneur Bruat qui sollicita à plusieurs reprises le Ministre de la Marine et des Colonies pour embarquer Giraud vers la « nouvelle colonie » des Marquises.
C’est à Tahiti qu’il séjournera finalement, devenant ainsi, entre 1843 et 1847, le premier artiste-peintre français à vivre si loin et aussi longtemps, témoin privilégié d’une Polynésie que Gauguin jugea déjà perdue à son arrivée, cinquante ans plus tard.
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La reine Pomaré IV
Comme sur un portrait de cour de Renaissance
Pomaré trône, affirmant sa haute naissance
Faisant fi des représentations exotiques,
Elle se montre en grand personnage historique.
Pour couronne, des fleurs, et un regard hautain.
La blancheur du satin fait ressortir son teint,
Pomaré quatre aimait les soieries de Lyon.
Voit-on pointer les mers du Sud à l'horizon?
Absent, jupitérien, son regard est lointain,
Léger col échancré, pas encor puritain.
Pour sceptre un éventail au détail ambigu
Mais le peintre appointé obtiendra-t-il son dû ?
Ce tableau, un trésor gardé à Tahiti
Se décline autrement, musée du quai Branly.
Miss Yves
Portrait de la reine Pomaré
Photo (C) RMN-Grand Palais (musée du quai Branly - Jacques Chirac) / Christian Jean
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Le portrait conservé à Tahiti constitue une commande officielle de 1851, à la suite du souhait de la Reine d’en recevoir un à sa propre effigie.[3] Le gouvernement français chargea donc Giraud de le réaliser, à l’huile et de grandeur nature. Il semble qu’un litige ait eu lieu au moment du paiement des 800 Frs facturés par l’artiste, finalement revus à la baisse pour un montant de 600 Frs.
On y voit la Reine représentée de face, assise et accoudée sur un support recouvert d’une étoffe rayée dont les reflets satinés font échos à ceux de sa tenue. Cette astuce visuelle ajoute à sa prestance et équilibre la composition. La souveraine est aussi visuellement soutenue par les troncs et feuilles de bananiers qui la replacent dans un contexte insulaire et en deviennent presque un emblème. Le tableau s’ouvre sur le côté arrière droit avec un paysage qui, de prime abord, ne semble pas particulièrement local bien que certains y voient « les formes imprécises d’une île, la mer ».[4]
Ce cadre et cette posture évoquent ainsi les traditions de portraits d’apparat européens en vogue dès la Renaissance. La Reine est figurée en majesté, de face, grave, hiératique, dans une image qui la détache des mythes et du portrait littéraire exotiques.[5] Elle devient ainsi un personnage historique grâce à un costume occidental et à une sévérité « toute jupitérienne ».[6]
Pomare était connue pour revêtir « des robes confectionnées avec les plus belles étoffes de Lyon » lors des cérémonies publiques.[7] Sa tenue satin ivoire à manches demi-courtes possède un col relativement ouvert et une légère collerette plate qui entoure ses épaules. Les fronces du vêtement se rejoignent par un nœud en ruban central. Aux doigts de sa main droite, des anneaux précieux offrent un rappel de la brillance de l’étoffe. Cette dernière révèle une pièce en tissu plus fin, peut-être une longue tunique sous-jacente.[8] Quoiqu’il en soit, Giraud semble avoir offert une attention particulière au détail historique puisque les cols des robes missionnaires, ornés d’une collerette dans les années 1820, s’ouvrent largement dans les années 1840, avant de se refermer jusqu’au cou vingt ans plus tard.[9]
Malgré sa tenue européenne, la souveraine souvent surnommée « Victoria des Mers du Sud »,[10] conserve certains emblèmes tropicaux. Elle est ici représentée avec une complexion plutôt réaliste. Giraud est en effet l’un des rares à utiliser alors des ocres relativement foncés pour rendre son teint,[11] en opposition à la tendance à un rendu plus pâle dans les représentations de Polynésiens et Polynésiennes.
Pomare porte une couronne végétale – bien qu’elle évoque plutôt des roses, d’ailleurs décrites plus tard comme artificielles par sa belle-fille Marau,[12] des fleurs d’hibiscus en pendant d’oreilles et un éventail de plumes. Ce dernier illustre toute l’ambivalence de ce portrait, au chevauchement des deux sociétés, l’une « traditionnelle », l’autre européenne.[13] Car si l’éventail est bien un attribut polynésien de prestige (voir le magnifique exemplaire présenté dans l’exposition Tupuna transit au Musée de Tahiti et des Îles), il semble ici confectionné en plumes blanches particulièrement fournies – d’autruche peut-être – et comporte, en son centre, un médaillon combinant orfèvrerie et glyptique. La légende aurait fait voyager cet éventail jusque dans les collections du British Museum, après avoir été offert par Pomare à la Reine Victoria.[14] Malheureusement, il ne semble pas en rester de traces aujourd’hui.