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mercredi 27 octobre 2010

Crochet à goutte d'eau (5)


Accro de dix mots

Accablé de fatigue et pris d'acrophobie
Je crève sur un bloc où je reste fixé
Comme un grimpeur K.O au pied du Tourmalet
Ou premier de cordée au bord de Gavarnie.

Salut, bloc de granit sans la moindre fêlure !
Bouclier accueillant sous les nuages épars !
Salut, dernier recours! Pas la moindre fissure ?
Crochet à goutte d'eau , secours dû au hasard !

D'une main je saisis le crochet solidaire
De l'écaille complice, et sur le fil de soie
A l'hameçon vissé , délaissant mon repaire,
Vais réseauter le roc le chargeant de mon poids.

Ainsi, prêt à quitter l'horizon de granit,
Harmonieusement respirant à l'envi
Ne me retournerai, sans un regard d'envie
Ne contemplant ce lien avec qui je transite

Je voudrais un instant réfléchir aux agapes
Qui m'attendent plus bas-O délices de miel !
Au choeur de compliments, loin de ce roc d'agate
Auparavant sentir la vibration du ciel!

Miss Yves
sur le thème "Crochet à goutte d'eau", Olivier Salon in  El Capitan


Réécritures croisées:
Le Paresseux, de Saint-Amant (première strophe)
L'automne, Lamartine (Strophes suivantes)
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Le Paresseux

Accablé de paresse et de mélancolie, /
Je rêve dans un lit où je suis fagoté,/
Comme un lièvre sans os qui dort dans un pâté, /
Ou comme un Don Quichotte en sa morne folie. /

Là, sans me soucier des guerres d’Italie/
,Du comte Palatin, ni de sa royauté,/
 Je consacre un bel hymne à cette oisiveté /
Où mon âme en langueur est comme ensevelie./


Je trouve ce plaisir si doux et si charmant, /:
Que je crois que les biens me viendront en dormant/
 Puisque je vois déjà s’en enfler ma bedaine,/


Et hais tant le travail, que, les yeux entrouverts, /
Une main hors des draps, cher Baudoin, à peine /
Ai-je pu me résoudre à t’écrire ces vers.

Saint-Amant
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Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !


Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire,
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !


Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits,
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !

Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encore, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui ! 

 
Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ;
L'air est si parfumé ! la lumière est si pure !
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !

Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel !
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de m
iel ?

Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...

La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ;
Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.

Lamartine

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